Le Chevalier de Sang de la Non-Mort

Une aura sombre s'approche près du Manoir. D'une démarche raide, elle avance sans se soucier de l'odeur de mort qu'elle répand.
Elle s'arrête devant la porte, prenant le temps de regarder l'architecture, les ouvertures, les fissures, les enfractuosités, chaque détail qui pourrait servir.
Elle frappe à la porte, lentemement, de trois coups qui résonnent dans la batice.

L'aura sombre attend qu'on lui ouvre.
L'attente n'a pas été vaine, les portes s'écartent de son chemin.
Enfin.
Les Ténèbres personnifiées entrent dans le Manoir, écoutant chaque bruit, observant chaque détail comme pour la façade.
Elles retirent leur cape qui les cachait aux yeux du monde.
Sous la cape, se tient un troll aux yeux céruléens et brillants, au teint bleu comme un enfant humain qui est asphixié dans le ventre de sa propre génitrice, les muscles tendus comme parés à toute éventualité, de nombreuses cicatrices lui servant de parrure sous son armure de saronite.
Mais tout cela n'est que détail face à se qui se détache de sa joue gauche et de son cou.
Un dragon noir aux airs menaçants y est tatoué, le "blanc" de ses yeux est noir, ses pupilles fendues et ses iris jaunes-oranges. Ses écailles sont d'un noir d'encre, il est orné de piques couleur jais et de crêtes mauves sombres. S'il n'était pas cloué sur le visage même de son propriétaire, il aurait bougé, enroulé ses anneaux au premier passant pour le dévorer ou autre acte néfaste pour ledit passant.

Les Ténèbres personnifiées en ce corps attendent patiemment votre réponse. Elles ont un hôte avec lequel elle peuvent jouer à leur gré et toute une éternité tant qu'elles resteront au sein de cet hôte.

Klæl attend.

Les Ténèbres observent ce petit bout de femelle vert s'égosiller pour leur trouver un quelconque acceuil.
Quelle charmante attention.
Elles suivent docilement la Gobeline qui leur trouve un place dans une salle commune. L'hôte avance avec sa démarche raide toujours. Elles regardent par les yeux de leur hôte les détails, encore une fois.

A peine arrivées, Elles sont déjà bien entourées d'Ombres, portant toutes une marque dans la paume gauche.
Un sigle noir, plus précis chez certains que d'autres, comme brûlé à même la chaire.
Les Ténèbres sentent l'arrivée de la Lumière du prêtre. Elles frisonnent d'horreur et de douleur devant cette pureté d'âme et de coeur.
Quelle malédiction pour ce pauvre prêtre ! Ce doit être terrible à supporter.
Lorsque son "frère de race" s'approche plus, Elles reculent l'hôte, comme pour se protéger de sa Lumière.
Maudite soit les Sacrés ! se dirent-Elles.
Le prêtre tend la main.
Que doivent-Elles comprendre ? Une attaque, le sourire aux lèvres ?
L'hôte penche la tête sur le côté droit fixant la main, après s'être reculé de deux bons mètres. Mieux vaut ne pas attaquer. Pas tant qu'il ne saura pas si ce Troll est néfaste pour lui ou pas.
Il ne fait rien excepté fixer la main tendue. Puis son regard remonte de la main et voit la source de cette damnation pour l'hôte.
Un dragon blanc, un ourboros
Vient ensuite un autre être vert, plus débordant d'énergie qu'une pile surchargée.
Les yeux céruléens des Ténèbres le suivent un instant puis se lassent.
La Gobeline sermone son "chéri", celui-ci se calme aussitôt. Comment un être femelle et aussi petit peut avoir autant de force persuasive sur un autre être de son espèce ?
Les Ténèbres observent ce fait avec étonnement et attention ... Mais rien ne transparaît sur l'hôte, sinon que son regard passe d'un Gobelin à l'autre, parfois sur le Troll pour vérifier la distance de sécurité.

Durant toute la durée de cette observation, le Chevalier resta silencieux.
Enfin il prend la parole ...

Demanda-t-il sur un ton méfiant à son frère de race, alors qu'il a failli faire un joli lapsus, remplaçant la "main" par une "malédiction".

Elles observent le salut.
Rien ne leur revient en mémoire des coutumes d'une quelconque tribu à laquelle le Troll aurait soi-disant appartenu.
Curiosité ...
Curiosité ? Un sentiment ?
Quelle drôle de sensation ... L'envie de découvrir.
Elles se laissent prendre par l'étrange émotion de curiosité et tentent l'inconnu ...
Mais le mot en lui-même ne vient pas à l'esprit des Ténèbres. Comment définir cela ?
Les Ténèbres essaient de refaire, avec lenteur et raideur, le "salut".

Pas des plus terribles ni des plus fluides.
Mais l'Hôte y parvient, non sans mal.

L'Hôte s'accroupit pour regarder le Gobelin droit dans les yeux.

L'Hôte fixe ses yeux sur la-pile-surchargée-mais-maintenue-par-une-aiguille-de-fer.
Ainsi, le mot qu'il cherchait en lui-même était "curieux" ...
Le Gobelin le prend par la main.
Après un moment de réticence et d'hésitation, le Chevalier laisse sa curiosité l'emporter.

La main de l'être vivant et vert est toute chaude sur la peau d'une fraîcheur cadavérique du Troll.
Encore une sensation qu'Elles découvrent : le contact avec un être à sang chaud.
Ca change des gants de métal et de fourrure ou du manche de leur lame.

Lorsque le Gobelin annonce que l'Hôte détenait lui aussi une marque, il lâcha briévement la main du Gobelin pour regarder.
En effet se trouvait un sigle noir, pareil que ceux des autres ombres, bien qu'un peu flou encore.

Jubilation
Jouissance
Satisfaction
Les Ténèbres avalaient ces mots gouluement, s'imprégnant de leur signification et de leur réalité.

Seule une lueur timide, ombre des émotions des Ténèbres cachées, se refléta dans les yeux du Chevalier.
Les commisures de ses lèvres se relevèrent imperceptiblement.

Quelle sera la suite ? se demanda Klæl ...